Alimentation
Jean-Claude Kaufmann Compte rendu par Colette Barroux-Chabanol
Paris, Editions Armand Colin, 2005 Rédactrice en Chef de l’Ecole des Parents
Histoires de cuisine, histoires de famille
Après le premier matin, le ménage, le linge, le repassage, il n’est pas étonnant de voir Jean-Claude Kaufmann, sociologue de notre vie quotidienne, s’intéresser à la préparation des repas, activité propre à l’homme qualifié d’“animal cuisinant ”.
Manger n’a jamais été une petite affaire puisque nul ne peut s’en passer. Mais manger, pour l’être humain, est bien plus qu’assouvir sa faim pour survivre : partager un repas, être commensal, crée du lien. Remplaçant l’autel des sacrifices qui rassemblait les mangeurs du passé, la “ table ”s’est introduite dans les familles au cours du XIXe siècle. C’est là qu’ont été pris en commun les repas, dans le respect de certaines règles : horaires, manières de table, place de chacun, silence imposé aux enfants... Quel contraste avec le paysage contemporain dans les familles où la table s’est démultipliée (table de cuisine, de jardin, table basse, pouf, plateaux), où diverses façons de manger co-existent (avec ou sans assiettes, avec couverts ou avec les doigts, chaud ou froid, menus structurés ou picorage, ensemble ou séparément, à heure fixe ou quand on a faim…). Partant de différents témoignages, Jean-Claude Kaufmann analyse comment ses congénères assument leur modernité, tiraillés entre autonomie et besoin de lien, entre devoir et plaisir, entre liberté et traditions.
Les situations exposées, si diverses soient-elles, révèlent bien les transformations qui ont affecté le déroulement des repas dans la société contemporaine et notamment leur rôle fédérateur (réel ou supposé) dans la famille. Si subsiste toujours le vieux rêve d’une famille rieuse et unie, égrenant les aménités au-dessus de la nappe aux couleurs des jours heureux, que se passe-t-il en réalité