L’homme est-il un être dénaturé ?

Depuis la paléolithique, l’homme s’est éloigné de la nature en devenant, dans un mouvement historique irréversible, un être de culture. En cultivant la terre et en aménageant le milieu extérieur par le travail et la technique, il a aussi profondément changé sa nature, notamment par les interdits religieux et l’éducation. Cette « mutation morale » comme l’appelle Georges Bataille dans son livre L’Erotisme et la création d’un monde humain fabriqué font-elles, pour autant, de l’homme un être dénaturé ? L’adjectif dénaturé peut avoir deux significations. D’une part, on peut le comprendre comme étant l’état actuel de l’homme résultant d’un processus de transformation de sa propre nature, au terme duquel il serait devenu étrangement méconnaissable sans pourtant trahir les projets de la Nature. D’autre part, un être dénaturé peut être un être dont la nature a été si altérée, pervertie qu’elle est devenue corrompue, c’est-à-dire mauvaise. Dans ce second sens, la dénaturation pourrait être interprétée comme négative alors que le sens premièrement évoqué pourrait être compris comme étant la manifestation du progrès, toujours positif. Ainsi, deux hypothèses sont possibles. Soit l’homme est un être dénaturé en apparence seulement car son progrès ne serait que la réalisation paradoxale de sa propre nature, soit l’homme est réellement dénaturé, au sens négatif du terme et dans ce cas, cette dénaturation pourrait être considérée comme la disparition définitive des qualités que lui avait données la Nature et qu’il n’aurait jamais dû perdre.
Nous verrons dans un premier temps que l’homme s’est construit sur une double négation puis dans un second temps que la culture fait office de dénaturation positive puis dans un troisième temps comment comprendre cette phrase de Rousseau extraite du Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes : « L’homme qui médite est un animal dépravé ».

Par observation, nous pouvons